Les mauvaises raisons de ne pas accepter un confinement
janvier 2021Quelque mauvaises raisons de ne pas accepter de confinement
Je réagis à deux articles :
Le premier dit des chose intéressantes et vaut surement la peine d’être lu.
Des positions cohérentes
Je vois un certain nombre de positions défendables au sens de «cohérentes».
- J’en ai marre de la covid; je m’en fous je fais ce que je veux et arrivera ce qui arrivera.
- Je fais ce que le gouvernement dit de faire parce que j’ai confiance en lui.
- J’ai de bonnes raisons (personnelles) de penser que faire A est bien. Donc je fais A, indépendamment de ce qu’en pense le gouvernement. Ici A peut être «se confiner», «porter le masque», «refuser des apéros», etc.
La position indéfendable
Il y a une position incohérente (celle défendue ici), c’est de dire «je sais que A est bien, mais je ne le ferai pas parce que le gouvernement m’oblige à le faire sans m’en donner de bonnes raisons».
L’autre position que je ne partage pas
La position défendue par David Madore est nettement plus intéressante.
Il demande, depuis déjà pas mal de temps, une preuve de l’efficacité des confinements. Le fait est qu’un confinement étant une lourde violation de droits fondamentaux, une analyse bénéfice/risque doit être faite. Et le moins que l’on puisse dire est que cette analyse n’est pas faite.
David Madore propose un certain nombre d’explications du fait que les confinements semblent fonctionner.
Le problème avec son raisonnement est que la situation est horriblement complexe, toute comparaison avec des pays étrangers reste très hasardeuse tant qu’on n’aura pas (beaucoup) de recul.
Donc il faut faire son deuil d’avoir un argument en béton (voir même simplement convainquant) pour dire que telle ou telle mesure sert à endiguer la pandémie tandis que telle autre ne sert pas.
Essai-erreur
En attendant une sortie de crise par le vaccin, on tente de trouver quel ensemble minimum de mesure assure de garder l’épidémie sous contrôle. Parmi ces mesures, on trouve :
- télétravail
- couvre-feu à 20h/18h régional/global (ça fait 4 possibilité fois 2 exposant le nombre de régions)
- fermer les école/universités
- masque obligatoire à l’extérieur, à l’école, …
- encourager le vélo pour vider les transports en commun
- interdire les rassemblements de plus de 1000/500/10/5 personnes
- fermeture des universitée/ENS/…
- etc.
Et bien entendu, toutes les combinaisons possibles de ces différentes mesures.
Bien malin qui pourra donner un ensemble minimum assurant un contrôle de la maladie.
Donc il n’y a pas d’autres choix que de faire de l’essai-erreur en prenant plus ou moins au hasard certaines mesures et en renonçant à trouver un argument imparable pour dire que telle combinaison est «meilleure» qu’une autre.
Le mieux que l’on puisse faire est de classer ces mesures dans l’ordre du plus léger au plus lourd et de les mettre en oeuvre dans cet ordre jusqu’à maintient de l’épidémie dans des bornes «raisonnables».
Plus léger / plus lourd ?
Classer les mesures possibles du plus léger au plus lourd semble déjà impossible.
- J’ai déjà lu des personnes argumenter que le port du masque était déjà une mesure tellement autoritaire et privative de liberté qu’elle ne pouvait pas se justifier, même avec l’assurance de sauver des vies.
- Des personnes comme David Madore ne semblent pas remarquer qu’avoir les écoles ouvertes change totalement la vie de nombreuses personnes. Pour lui, le second confinement a été nettement plus dur que le premier.
Ces deux exemples pour montrer qu’aucun classement ne fera l’unanimité. Et pire : aucun classement n’aura ne fut-ce que le support d’une petite majorité.
Quoi qu’on fasse, une majorité sera contre. Y compris bien sûr ne rien faire.
Épidémie «raisonnablement» sous contrôle
Qu’est-ce que garder l’épidémie «raisonnablement» sous contrôle ? Là non plus il n’y aura jamais consensus.
Tant qu’une seule personnes travaillant dans le secteur de la santé a encore des heures supplémentaires à rattraper, il est possible d’argumenter que la situation n’est pas «raisonnablement» sous contrôle.
D’aucune diraient qu’on ne va pas enfermer toute le population française pendant un mois juste pour permettre au personnel de santé de prendre une semaine de vacance.
«le gouvernement»
Le gouvernement, c’est beaucoup de monde. Chacune des personnes au commande a ses propres idées à la fois sur l’objectif à attendre et sur l’ordre dans lequel les mesures doivent entrer en vigueur.
Il est déraisonnable de croire que «le gouvernement» a une stratégie. Chaque membre du gouvernement a son idée personnelle, qu’il module avec ce qu’il croit des idées de son électorat.
Ce qui ressort de la communication gouvernementale est une espèce de moyenne de tout ça. Et c’est normal que ce soit comme ça. On ne peut pas raisonnablement espérer mieux.
Bref
Les gens qui demandent plus de rationalité/transparence dans les objectifs à atteindre et dans l’évaluation de l’efficacité des mesures prises pour y arriver en resteront pour leur frais.
À mon avis
À mon avis les confinements, au sens strict de l’interdiction de sortir, ne servent à rien en tant que tels.
Un effet assez net des confinements que je vois autour de moi, et qui peut expliquer une partie de leur efficacité, est qu’ils rendent plus socialement acceptable de refuser des invitations.
Durant un confinement, il est facile de refuser une invitation; et d’ailleurs les invitations se font plus rares.
Hors confinement, il est plus compliqué de refuser une invitation. J’ai toujours envie de répondre «tu sais qu’un il y un lien causal parfaitement établi entre ce que tu proposes et le fait que des gens meurent ?». C’est certainement la vérité, mais c’est compliqué à répondre. Du coup je me rabats sur xkcd, mais c’est horriblement gênant.
Bref, les confinements aident les personnes qui veulent restreindre leurs interactions sociales, parce que les gens trop sociaux ne se rendent pas compte de l’embarras dans lequel ils mettent les autres.